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Pour une étrange raison, quand ils faisaient l'amour, Olivia ne voulait jamais enlever ses escarpins. John l'avait souvent asticotée à ce sujet, déjà, il n'aimait pas le contact froid du cuir, et puis, les talons aiguille l'avaient égratigné plus d'une fois.
À chaque fois qu'il posait la question, la directrice lui répondait :
" Depuis quand l'employé interroge-t-il son supérieur? "
ou :
" Tais toi et passe moi la bouteille "
ou encore :
" Assez parlé, au boulot, sale gigolo ".
John, qui était un gentil garçon dans le fond, était un peu fatigué de ce genre de traitement. Il n'aimait pas être menotté à son siège, ou à quoi que ce soit d'autre, d'ailleurs. John Rose avait toujours intacts, ses rêves virginaux de grands lits blancs et de pétales de roses, même si, faute de suite royale dans un palace indien, la photocopieuse pouvait aussi faire l'affaire.
En tout cas, ce soir là, ils avaient vraiment trop bu. Mrs Felton tenait toujours mais John délirait, allongé sur la table, torse nu et bien décidé à réussir à décoller jusqu'au plafond par la force de sa pensée.
Tout en se cambrant, et en plissant les yeux ( quand john se concentrait très, très fort, il affichait un genre d'expression renfrognée, contractant chaque muscle de son visage ) il essayait au moins de soulever la tête de quelques millimètres. Il se rendit bien vite compte que ça n'était pas aujourd'hui qu'il ferait la nique à Newton. Il était presque quatre heures du matin, ce moment de la nuit où l'on a très froid et où l'on se sent toujours seul, même quand on est ivre, même quand on est accompagné. Olivia commença à se déshabiller sans rien dire, mais, même quand elle fit glisser sa jupe, elle prit bien soin de garder ses talons.
" Pourquoi tu... "
Elle lui mit un doigt sur la bouche.
" Qu'est-ce que ça pourrait bien changer pour toi, de savoir. "
" Rien. "
Il soupira.
Lorsqu'elle monta sur la table, sa chaussure droite laissa une longue, longue éraflure sur le bois verni.